Peggy B.

Parfois je fais une séance de constellation familiale.

On entre, accueilli par cette femme toujours rayonnante d’elle-même, par je ne sais quel mystère d’ailleurs, je me garde bien de le demander tant il me plaît. Un thé pour commencer, un thé pour terminer. Entre les deux, il se passe une heure, peut-être plus, le temps qui m’obsède d’habitude n’a plus d’emprise ici. Les larmes à peine retenues, le cœur léger, ou l’esprit sombre, saturée de questions ou me demandant pourquoi être venue, cette heure là ne me laisse jamais comme elle m’a trouvée. Jamais. J’ai passé à l’essai une vingtaine des thérapies. Je n’ai gardé que celle-là : rapport qualité-prix imbattable. Pas de chichis, pas de blabla, je déballe en vrac l’humeur du jour, on dégage une idée, quelques feuilles A4 annotées d’un mot, d’un prénom, et la séance démarre, je vous laisse découvrir avec quelle simplicité.

Une plongée dans les âges, dans les sens. Loin des brouhahas de la tête. Quel que soit le thème, ça vient vite et fort. Je m’accroche à ce qui monte comme à une bouée de sauvetage, Catherine en phare immuable. Un bras bien aggripé à la bouée, mer menaçante sous mes jambes nues, je regarde, et je repêche. Je sauve. Ceux qu’on croyait perdus en mer sont là, à la lumière du phare, ils nageaient. Depuis l’enfance, depuis l’adolescence, ils nageaient loin du port. On met parfois du temps à se reconnaître, peut-être comme ces gens qui retrouvent leur parent, leur frère. On se sent un peu étrangers, le temps ayant marqué différemment les visages. Et puis le phare repasse. Et on sait. On embrasse, on pleure, de ces vielles larmes du fond des nuits sombres.

Et on rentre au port, dans une accolade vielle comme le monde.

On boit le thé. Sans mots. Les yeux disent merci.
 On reprend son manteau, un peu plus chaud, un peu différent. Tout est un peu différent.